La loi rend pénalement répréhensible toute discrimination fondée entre autres sur la langue ou la nationalité (article 225-1 du Code pénal). Il est intéressant d’imaginer les poursuites qui peuvent être engagées à ce titre.

La plus banale concerne le refus d’emploi sur un chantier, ou celui d’un conducteur de camion. Il est discriminatoire d’exiger la maîtrise du français. Bien. Mais que se passe-t-il si le candidat ne parle pas un mot de français ? Si, pire encore, son alphabet n’est pas le nôtre ? Le risque d’accident sur le chantier, le risque de faute de conduite par défaut de lecture des panneaux de signalisation ou des instructions affichées est majeur. Qui pense, qui prévoit, qui juge ?

Plus innovante est la plainte qui peut venir d’élèves ou d’étudiants appelés à concourir en français. Au nom de quoi refuser une copie de Bac en aztèque, un mémoire en nazaréen, une thèse en amharique ? S’il est discriminatoire d’exiger la pratique du Français, tout élève, tout étudiant peut se plaindre de n’avoir pu exprimer ses connaissances dans la langue de son choix. Le respect de l’individu vaut bien quelques frais de traduction ! Et en toute logique, sanctionner des fautes d’orthographe est déjà une discrimination coupable. Qui pense, qui prévoit, qui juge ?

Plus problématique encore est l’enseignement de leur langue par les parents. Dans le monde sans discrimination qui se prépare, les enfants seront appelés à choisir leur sexe (le couple princier britannique donne l’exemple en promettant un prénom neutre pour leur futur enfant, charge à ille de décider plus tard d’être garçon, fille, ou neutre). Pourquoi ne pas interdire aux parents de leur assigner une langue, porteuse d’une assignation identitaire coupable, dans une démarche porteuse de regrettables ambiguïtés, voire de composantes racistes ? Comment accepter que la langue de colonisateurs blancs soit imposée à des enfants innocents ? Qui pense, qui prévoit, qui juge ?

Faut-il poursuivre ? Oui sans doute, tant le suprématisme blanc imprègne les arts. Une exposition consacrée à la diversité dans l’impressionnisme au Musée d’Orsay renomme les tableaux selon les personnages secondaires (l’Olympia de Manet est renommée Laure, du prénom de la femme de chambre africaine au second plan). Des spectacles sont menacés quand ils ne respectent pas le droit des minorités à l’intégrité de leur culture, des symboles et des formes qui leur sont propres (le Cirque du Soleil l’a découvert au Canada), et se livrent à l’appropriation culturelle. Et puisque la nationalité ne doit plus être un facteur de discrimination, pourquoi réserver le droit de vote aux citoyens, ou aux résidents établis sur un territoire ?

Discriminer Hervé Juvin
source : https://institut-iliade.com

Le délire est complet. Il est partout, puisque discriminer est l’acte même de la raison. L’avocat parisien Thibaut Mercier en donne des exemples frappants dans son livre : «  Athéna à la Borne » (chez P.G. de Roux) et pose la question ; « discriminer ou disparaître ? » La vie est discrimination — et d’abord, d’avec la mort. La pensée est discrimination, qui entend séparer le vrai du faux. La Nation est discrimination, qui n’existe pas sans la frontière, et si elle ne préfère pas ses citoyens.

Faut-il ajouter qu’une politique qui ne discrimine pas entre les discriminations injustifiées, illégitimes, et les discriminations utiles, voire vitales, ne fait qu’ajouter la confusion par la loi au désordre du monde, et nuit gravement à ce qu’elle prétend protéger comme égalité, comme justice et comme liberté ?

Hervé Juvin

Catégories : Société

3 commentaires

Un Oeil · 27 mars 2019 à 22 h 53 min

Cela s’appelle « glottophobie », j’en parlais ici : https://unoeil.wordpress.com/2018/06/07/linculture-satisfaite/

Vauchot · 29 mars 2019 à 6 h 08 min

Que du bon sens! Notre société est à la dérive. La notion même de société est bousculée dès lors que les fondamentaux tels que la langue ne sont plus respectés.

Bern · 29 mars 2019 à 6 h 32 min

La discrimination est aussi très utile pour séparer ces fameux « amalgames »!

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