Une écolière suédoise, Greta Thunberg, est propulsée à la tribune de la COP22, mobilise des milliers d’écoliers et de lycéens et intime l’ordre aux gouvernements de sauver la planète. L’excellence de sa cause dispense quiconque d’interroger ; pourquoi, comment, par qui, avec quels financements, au service de quels intérêts ? J’attends qu’un journaliste pose les questions qui s’imposent sur son idéologie écologique.
Les images-chocs se diffusent, la propagande s’agite, et des pressions s’exercent pour que l’ONU établisse un droit du réfugié climatique, analogue au droit du réfugié politique, ce qui consacrerait en réalité le droit illimité de tout individu à s’établir dans le pays de sa convenance. Voilà sur quoi débouche le couple monstrueux de l’écologisme et du globalisme. Qui ira apprécier la réalité du changement climatique, analyser ses causes, et valider ou refuser en conséquence la qualité de « réfugié climatique » à celles et ceux qui prétendront franchir les frontières parce que le soleil est trop chaud, ou la glace trop froide ?
L’argument du dérèglement climatique dérive peu à peu en refus de la géographie et du climat. Deux solutions ; la mise hors sol de l’humanité, par climatisation permanente, sortie des hommes de leur milieu naturel au profit de bulles artificielles créées, alimentées et protégées par l’industrie ; ou bien la mobilité géographique individuelle et sans condition, qui devrait précipiter quelques centaines de millions de ceux qui vivent sous les latitudes élevées comme autour des Tropiques ou de l’Équateur, vers ces eldorados que deviennent les pays à climat tempéré.
Deux solutions à rebours de l’expérience millénaire des sociétés humaines, qui ont progressé en s’adaptant aux déterminations de la géographie, du climat, de la vie, et qui ont survécu en se différenciant les unes des autres. Deux solutions, qui parachèvent le projet moderne d’extraction de l’homme de la nature ; est homme qui en a fini avec la nature ; est homme qui n’a pas de nature ; est homme qui est son Dieu.
Le changement climatique est une réalité qui se prête à de redoutables manipulations politiques. L’agenda mondialiste, bien mal en point depuis la crise de 2008 et le retour des peuples, a trouvé sa nouvelle formule ; en un mot comme en cent, pour sauver la planète, il faut en finir avec les Nations ! La leçon de l’Anthropocène, c’est que l’homme n’a plus à se soucier de faire l’histoire ; il doit faire nature — c’est-à-dire substituer aux arrangements entre nature et culture qui ont fait l’histoire, les produits de la technique, de la finance et de l’ingénierie du vivant !
En avant pour une Banque du climat qui fait déjà saliver tous les prédateurs des hedge funds et des produits dérivés ! L’écologie assure le recyclage des vieilles utopies socialistes, progressistes et rationalistes, en les accommodant d’un libertarisme venu à point nommé ; au moment où les rêves sans frontiéristes tournent au cauchemar, au moment le bilan de la globalisation s’avère dramatique, l’écologie donne le change en désignant un seul et unique coupable aux maux de la terre, l’homme blanc colonisateur et marchand. Elle investit sans complexe le Camp du Bien ; Greta Thunberg fait pleurer le Parlement européen, l’émotion est de son côté, donc la raison et le Bien qu’elle transporte dans son cartable !
Les enjeux politiques de la manipulation de l’écologie par ceux qui en font une nouvelle religion en assurant que notre salut est en jeu, en mobilisant la peur et en suscitant l’intolérance sont considérables. Parce que nos Nations sont en jeu, et notre capacité à décider nous-mêmes de nos choix, pas des experts, des juges ou des ONG. Parce que le monopole du Bien n’admet pas le débat, la confrontation des idées et des intérêts, le jeu démocratique en un mot ; face à lui, ne peut être que le Mal. Pas un adversaire qu’il faut surpasser, mais un ennemi qu’il faut détruire.
La planète est en jeu ; qui peut ajouter un mot à qui détient la formule unique du salut ? L’amalgame entre sauver la planète, ouvrir les frontières et placer les Nations sous tutelle est constant, il ne relève pas du hasard. Enjeux considérables encore plus, parce que la religion écologique délégitime les expressions de la diversité des sociétés, des Nations et des peuples qu’étaient les politiques publiques, les systèmes juridiques et les modèles sociaux.
Dans sa brutalité naïve et revendiquée, c’est un nouveau totalitarisme qui est en train de naître, celui du salut écologique, contre les États, les Nations et la liberté des peuples. Le projet de gouvernement mondial par les savants et les sachants, bien mal en point depuis que la globalisation a trahi les promesses d’amélioration générale des conditions de vie qui lui avait valu un consensus immérité, a trouvé un nouveau « Sésame ouvre toi » pour forcer les frontières, réduire les critiques au silence et museler les opposants.
La priorité écologique est d’en finir avec la globalisation, la mobilité infinie, et cette fiction destructrice qu’est la suppression des distances. Le combat écologique commence par renouer les liens qui ont été rompus avec la terre, l’air et l’eau, avec les arbres, les plantes et les animaux, par accepter que nous sommes « prisonniers de la géographie » comme du climat (selon le titre du livre de Tim Clark), par reconnaitre que l’homme est de la nature comme il est de la liberté, bien avant d’être de droit. Et il commence par mettre hors d’état de nuire ceux qui aiment tellement la planète qu’ils détestent leurs voisins, leurs chats, leurs ruches, ou les cloches du village.
L’Union européenne doit s’interdire toute complaisance à l’égard de mouvements qui ont pour première cible l’indépendance énergétique, alimentaire, financière des Nations d’Europe, et pour premières victimes, des enfants manipulés par une propagande sans retenue. Elle doit dénoncer une idéologie écologique qui oublie de désigner la surcharge démographique comme facteur majeur de déstabilisation des rapports entre les hommes et leurs milieux – mais il faut bien qu’augmente le nombre de consommateurs pour que les dividendes bondissent !
Il est urgent de mettre fin à des politiques de développement standardisées, jugées sur des critères occidentaux, inadaptées aux réalités de terrain, et dont le premier effet est de nourrir la vague migratoire ; le maintien au pays, la stabilisation des populations rurales sur leur territoire, la possibilité pour chacun de vivre et de travailler chez soi, dans son pays et près des siens, doivent devenir les critères de jugement de toute action de développement et d’aide économique. Et il est urgent de réaffirmer que la diversité des modèles, des organisations et des systèmes est l’insurpassable effet de la liberté politique, le premier patrimoine de l’humanité, et le plus sûr gage de notre survie.
Hervé Juvin
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